luna milonguera

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A propos du Tango par Estefani Diaz Deleon.

Estefani Diaz Deleon naît à Montevideo, de parents uruguayens. C'est grâce à son grand-père qu'elle arrive au tango. Ses oncles et sa grand-mère avaient l'espoir qu'elle devienne la vedette d'une troupe ou reine du carnaval, étant l'unique femme parmi quatre cousins et deux frères. Estefani est passionnée de musique, surtout la musique classique dont s'inspire le tango. Adolescente, elle se souvient que lorsqu'elle allait chez ses grands-parents, elle s'asseyait dans le patio et regardait son grand-père faire des réparations tout en écoutant des tangos sur son vieux tourne-disques. Il lui traduisait l'argot qu'elle écoutait et qui lui plaisait : "Tres Amigos" de Troilo chanté par Marino. En l'écoutant, son grand-père s'assit et ses yeux se remplirent de larmes. C'est à partir de ce moment-là qu'elle comprit que le tango, est ni plus, ni moins, la vie.

L'année suivante, sa meilleure amie, Natalia Tejera, excellente danseuse de folklore, l'emmena à une milonga où jouait le quartette de tango "Ricacosa" dont son frère était l'un des membres. C'est à cette soirée qu'elle dansa pour la première fois un tango sans en connaître un seul pas.

"C'est fou comme celà m'a inspirée" dira-telle. C'est à partir de ce moment qu'elle ne put sortir de ce sentier. Elle commença à aller aux milongas de "Joven Tango" (institution de référence dans cette discipline à Montevideo) les vendredis, samedis et dimanches. Elle y apprit à danser car elle n'avait pas les moyens de se payer des cours, et ainsi elle se façonna son propre style.

Voici cinq ans qu'elle danse avec Marcelo Sassi.

Ce fut toute une évolution. Ils commencèrent à s'entraîner pour améliorer et enrichir leur tango. Au début, celà lui paraissait ennuyeux et fastidieux étant donné que ce qui lui plaisait était l'ambiance de la milonga, "el abrazo"(enlacement) des partenaires. Elle pensait que le fait de s'entraîner et prendre des cours lui ferait perdre une part d'elle-même, de son identité. Elle craignait de ressembler à une autre. Mais plus tard, elle comprit que c'était une étape nécessaire. Alors elle commença à se lâcher, à incorporer des nouveautés à sa danse et son expression, mais sans perdre son identité.

La musique classique, chez Estefani, est très présente. Ses compositeurs préférés sont Beethoven et Mahler; elle les associe à D'Arienzo ou Pugliese. Elle apprécie Chopin pour sa délicatesse et son romantisme, tout comme Fresedo ou Di Sarli. Elle affectionne aussi particulièrement Debussy et Fauré pour leur impressionnisme.

Estefani a étudié la clarinette au Conservatoire Municipal de Musique de Montevideo. Elle aimerait lui consacrer plus de temps, autant qu'elle le fait pour le tango.

Dans les différentes musiques de tango, il y a, en particulier, un instrument qui lui plaît beaucoup : la contrebasse. "C'est viscéral, ça me bouleverse le coeur quand je l'entends, c'est la colonne du tango". Les violons lui procurent harmonie et paix. Le piano lui donne par moments l'impression de l'inviter à jouer et redevenir une enfant.  Le bandonéon, quant à lui, est une gifle sans anesthésie, la vie même.

Elle aime aussi bien les tangos instrumentaux que ceux chantés.

Le tango n'est pas seulement de la musique, mais aussi de la poésie, l'histoire qu'elle raconte. Parfois, il arrive qu'il y ait de beaux tangos instrumentaux avec des paroles sans importance, et d'autres fois des tangos avec des paroles telles, qu'elles en font de très bonnes pièces musicales, et lorsque vous les comprenez et qu'elles vous plaisent, cela signifie qu'elles sont parfaites.

Parmi les tangos qui l'émeuvent particulièrement , se détachent : "Grisel" de Contursi, interprété par Troilo et chanté par Fiorentino; "Una vez" chanté par Ortega du quartier El Cerro, "Patético" instrumental de Pugliese, "Destino de Flor" de Di Sarli et Florio; "Rie payaso" de D'Arienzo et Caceres, entre autres.

Lorsque Estefani et Marcelo participèrent pour la première fois au concours uruguayen de tango : "Los Reyes de la Milonga" (les rois de la milonga) Estefani était très anxieuse. Longtemps elle pensa que  "le milieu de la compétition" allait la corrompre dans sa façon d'être ou de danser.

Toutefois, avec le temps, elle dut se rendre à l'évidence que parcourir cette étape lui fut d'une grande utilité pour apprivoiser sa timidité.

Etre en contact avec une énergie hors du commun est ce qui la motive à participer à des championnats. Une énergie très positive: "ton coeur s'emballe", tu te retrouves avec des gens qui sont sur le même navire que toi, tous les coeurs sont réunis pour le tango. Tu te rends compte que  "ce genre" a frappé à la porte de milliers d'individus", et tout celà, finalement, grâce à Marcelo Sassi.

Estefani Diaz Deleon et Marcelo Sassi ont participé en 2015 au Mondial de Tango de Buenos Aires auquel se sont présentées environ 800 personnes, soixante-cinq couples sont parvenus à la demi-finale dont ils ont obtenu la 45e place.

Interview faite en septembre 2017

Traduction : Jacqueline Evenou.

 



03/10/2017